mardi 30 novembre 2010

ITIL - Chapitre 3 - Principes communs aux démarches qualité orientées processus

1. La démarche processus
2. Les indicateurs
3. Le tableau de bord outil de pilotage
4. La boucle du progrès

1. Définition d'un démarche qualité / processus
 
La norme AFNOR (FD X 50-176) distingue 3 grandes familles de processus ; on verra en abordant les aspects systémiques de l’approche qualité, que cette représentation à trois niveaux correpsond à ceux définis par Jean-Louis Lemoigne dans “ La modélisation des systèmes complexes ” [Lemoigne 96]



• Les processus de réalisation : Produit, conception, fabrication, vente, prestation
• Les processus de support ou de soutien : Ressources, Formation, Informatique, comptabilité, maintenance
• Les processus de management ou de pilotage : politique, stratégie, technologie et innovation, plan, budget, Décision, Mesure


Les processus opérationnels ou de réalisation


Ils contribuent à la réalisation du produit ou service. Ils sont dans le faire de l'entreprise.


Qu'est-ce que fait en effet l'entreprise ? selon le cas : elle - fabrique - commercialise - répare - C'est ce que l'entreprise facture au client. Nous avons donc ici les trois processus de notre exemple.


Plus généralement, les processus opérationnels regroupent toutes les activités dédiés au cycle de vie de produit ou service et peuvent englober selon les cas les activités suivantes : recherche marketing, développement des nouveaux produits, avant vente, vente, conception, production...


Les processus de support


Également appelés processus de soutien, c'est-à-dire les étapes et système dédiés aux ressources humaines (implication du personnel, formation et qualifications), et les ressources liées aux infrastructures


Leur fonction réside à contribuer au bon fonctionnement des autres processus par l'apport de ressources nécessaires : exemple : gestion des compétences, formation et qualification des auditeurs, gestion de la trésorerie, achats...


Les processus de direction ou processus de management


Voilà des processus essentiels. Ils sont le nerf du système. Ils participent et contribuent en effet à la détermination, à l'élaboration de la politique et au déploiement des objectifs dans l'organisme. Ils sont les fils conducteurs des processus opérationnels et de soutien. Ils les pilotent, les surveillent. Ces processus intègrent la Revue de Direction, le Pilotage de l'amélioration continue, le Management de la qualité...


Harrington dans son ouvrage intitulé "The improvement process" définit le processus ainsi :

"Un processus d'entreprise est une série d'activités qui, à partir d'un intrant, y ajoute de la valeur pour produire un extrant"... [Harrington]

Ce n'est pas le produit mais bien le processus servant à créer le produit qui assure à l'entreprise sa réussite à long terme. De même, ce ne sont pas ceux qui réussissent qui font les bons produits. Ce sont ceux qui font de bons produits qui réussissent".


Un processus


De type organisationnel, un processus consiste en un ensemble d'opérations ou d'activités réalisés par des acteurs avec et à l'aide de moyens, selon des références en vue d'une finalité. A ce titre, un processus est toujours orienté vers un bénéficiaire ou un système bénéficiaire, interne ou externe. Ainsi un processus peut comprendre des activités réalisées par différents services, différentes entités. Ils peuvent en effet être transversaux , ce qui induit des points de rencontre entre les services appelés interfaces, points déterminants de l'amélioration du produit ou du service rendu auprès du bénéficiaire. Les coûts d’interface sont un vieux sujet dans le monde de la qualité.


Bref, un processus est une suite ordonnée d'actions destinée à produire un résultat.


processus versus procédure :


une procédure est un document qui décrit et formalise les tâches à accomplir pour mettre en oeuvre le processus. C'est un document de support et de communication qui porte à la connaissance de tous les processus de l'organisation. On appelle également la procédure Mode Opératoire


L'approche processus


L'approche processus présuppose un cadre rigoureusement établi caractérisé par la politique et les objectifs qualité. La politique énoncée et les objectifs qualité donnent l’orientation d'optimisation des processus qu'il importe avant tout de mettre à jour. Ainsi, l'objectif de cette approche est d'améliorer la satisfaction des clients par le respect de leurs exigences.


C'est en effet un outil de management qui donne le LA dans la détection des risques et la progression durable de l'entreprise en terme d'organisation. Concrètement, l'approche processus désigne l'application d'un système de processus au sein d'un organisme, ainsi que l'identification, les interactions et le management de ces processus. On cherche ainsi à retrouver la linéarité et l'enchaînement logique d'actions qui concourent à satisfaire les exigences du client, plutôt qu'une succession d'étapes indépendantes et cloisonnées par service.


Par ailleurs, cette mise à plat des processus permet aussi :


• de clarifier les rôles et responsabilités exercées,
• de comprendre et satisfaire les exigences
• de définir les marges de manœuvre et de mettre en évidence les cohérences et les incohérences, de même que les risques encourus
• d'identifier des lacunes dans le circuit dans la manière de faire, ou bien d'identifier des étapes qui grèvent le fonctionnement d'un processus.
• de considérer les processus en termes de valeur ajoutée
• de mesurer la performance et l'efficacité des processus
• d'identifier des attentes jusqu'alors minimisées
• de diminuer les coûts, les délais d'un processus
• de mieux appréhender les aléas, à les anticiper parfois et y répondre dans le cadre d'une réaction saine et concertée
• d'accompagner la mise en place d'un système d'information ad hoc et au plus près de la réalité, et non point seulement conceptuel.


Ceci dans une optique qui peut être indépendante d'une action de certification. On peut en effet songer aux démarches liées à la mise en place d’un ERP comme comme SAP.


Aussi, l'approche processus se fonde sur une identification méthodique des processus de l'organisme par... l'organisme. Une identification qui liste et met en évidence :


• leur périmètre (champ couvert par chaque processus en termes d'activités, de production et d'acteurs).
• leur nature (management, réalisation, support)
• les interactions et articulation entre chacun d'eux , entre processus mais aussi à l'intérieur d'un processus.
• leur management en termes de définition d'objectifs, pilotage, analyse et amélioration.


Ce travail d'investigation est proprement dynamique , borné et sensé à l'image du mot lui même processus dérivé de procès, procession, procédure, procédé découlant de la racine latine commune procedere signifiant étymologiquement marche, développement, progrès. (Pro = en avant, cedere = aller).


les caractéristiques du processus


Le ton est donné, il s'agit de sortir l'entreprise de ses rapports statiques et structuraux de son fonctionnement et d'opter pour une vision globale et transversale de l'organisme, d'entrer donc dans ses rouages et articulations, de dessiner l'architecture dynamique de tout ce qui s'y fait de façon la plus exhaustive possible. Le Fascicule FD X 50-176 définit d'ailleurs cette exhaustivité en trois points incontournables et pour le moins étonnants. La description d'un processus est en effet caractérisée par :


• la vitalité
• la représentation
• les objectifs


Ces trois aspects montrent la précaution adoptée par les concepteurs de la norme pour éviter les dérives constatées dans les systèmes qualité mis en place précédemment selon le référentiel ancien (immobilisme résultant d'une gestion papier très lourde), et donner à appréhender l'approche processus au travers d'une approche préalable de l'approche ! Le mot est lâché, l'entreprise est un organisme devant faire preuve de vitalité. Les auditeurs s'attendent donc à approcher un système qualité mouvant et vivant. L’aspect systémique du management de la qualité est explicite.


Ladite vitalité donc s'exprime et trouve son expression dans :


• les objectifs (identification des besoins et attentes du client et déploiement des objectifs qualité définis par la Direction, pouvant être par exemple SMART : Spécifiés, Mesurables, Acceptables, Réalistes et situés dans le Temps)


• la mesure de ces mêmes objectifs à l'aide d'indicateurs

Ainsi, les caractéristiques d'un processus (ou process) prennent en compte les points suivants:


• Identification des activités majeures et flux d'activités en termes de cycle de vie du produit, processus client...par un décodage de leur mouvement, de leur chronologie (point de départ de l'identification).

• Identification des processus de support, également appelés processus de soutien qui recouvrent les ressources humaines, financières, l'information, le savoir-faire.

• Identification de l'environnement du système concerné (clients, partenaires, fournisseurs)
• Recherche des données d'entrée et de sortie de chaque processus
• Déclinaison des processus en sous processus
• Établissement de listes des ressources nécessaires à la maîtrise des processus
• Établissement des critères d'évaluation de ces processus

2. Les indicateurs
 
William Thomson, le père du cable transatlantique, disait à propos de la science et de l’instrumentation: “ To manage it, you must measure it. When you can measure what you are speaking about, and express it in numbers, you know something about it; but when you cannot express it in numbers, your knowledge is of a meager and unsatisfactory kind; it may be the beginning of knowledge, but you have scarcely in your thoughts advanced to the state of science.”

La mesure est la première étape vers la connaissance de la réalité, ce qu’on ne sait pas quantifier permet difficilement d’avancer. C’est encore plus vrai dans les sciences dites dures, mais en qualté

Le pilier de la qualité hard, de la conformité aux spécifications du produit ou du processus, c’est l’indicateur. Il est bon d’avoir les idées bien claires sur les indicateurs, leur rôle et leurs limites, car passé la première définition effectuée lorsqu’on met au point les tableaux de bords, on revient peu sur leur définition. Alors qu’est-ce que c’est un indicateur ? C’est un fait observable, mesurable et déterminé par un calcul qui identifie de façon qualitative ou quantitative une amélioration ou dégradation du comportement du procédé soumis à examen.


A ce titre, l'indicateur qualité réside en une information choisie, associée à un phénomène, destinée à en observer les évolutions au regard d'objectifs qualité comme l'exprime la Norme NF X50 -171 intitulée " Qualité et management des indicateurs et tableaux de bord qualité ".


Deux types d'indicateurs co-existent :


Indicateurs de résultat (ou de produit)


- Se réfère à la qualité du produit et prestation, ce type d'indicateur indique une valeur à un moment donné et reflète la réalité. Généralement sa lecture se fait dans la durée, La propension à l'efficacité ou non résulte en effet du cumul de ces données dans le temps.

- une mesure qui donne l'effet immédiat des activités de l'entreprise sur la population cible par rapport aux objectifs du programme.


Indicateur de processus


- une mesure qui donne l'ensemble des activités à mettre en œuvre pour atteindre un objectif déterminé, sur une période déterminée. Indique le respect des processus existant : ex délais

Il est évident que les informations contenues dans les indicateurs de processus peuvent faciliter l'interprétation des indicateurs de résultats. Ce lien n'est pas à négliger.

3 niveaux d'indicateurs peuvent ainsi exister :

Niveau 1 : Indicateurs liés à la satisfaction client : indice de satisfaction mesuré par enquête et indice d'insatisfaction mesuré par les relevés concernant le nombre de réclamations client. 
-- qualité visée (qualité soft)

Niveau 2 : Indicateurs liés aux résultats -- qualité perçue (qualité soft + hard)

Niveau 3 : Indicateurs liés aux processus -- qualité interne (qualité hard)

Propriétés d'un indicateur


Un indicateur doit être :


- Pertinent : l'indicateur doit être exactement approprié au phénomène à observer
- précis : c'est une donnée quantitative, qualifié qui doit fournir des informations univoques. Il se caractérise au moyen de taux, ratio, indice pondéré de plusieurs mesures, comptage, barème, qui doit être fidèle et sans distorsion.
- reproductible : la donnée doit revêtir un caractère stable pour être reproductible
- fiable
- communiqué (sensibilisation et implication du personnel)
- rapide à collecter et traiter ex :tableaux, diagrammes sectoriels, cible, histogrammes, signaux
- synthétique : il doit être facile à établir et pratique à utiliser. En qualité d'instrument de pilotage, l'indicateur est également un " outil de dialogue entre les utilisateurs ayant des cultures et des préoccupations différentes " précise la norme.


La norme X50-171 recommande de limiter de 5 à 10 le nombre d'indicateurs par niveau de pilotage. Il recommande également de classer les indicateurs par niveau de priorité devant servir à prendre les décisions adéquates au regard de ce qui est mis sous surveillance.


Toute définition fait suite à une réflexion commune devant de déterminer :


- son libellé, son objectif, sa variable, son mode de calcul, son unité de mesure, ses seuils, limites inférieures et supérieures, sa périodicité d'application, sa représentation.


Un indicateur n'a de valeur que s'il est associé à d'autres indicateurs. C'est l'analyse de l'ensemble des indicateurs qui importe pour obtenir une bonne exhaustivité des points à améliorer.


Limites d'un indicateur


Leur exploitation doit faire l'objet de révisions. Les objectifs qualité changent, il est alors indiqué de renouveler les indicateurs et de procéder à leur revue et révision pour vérifier si leurs caractéristiques sont actuelles ou non, pertinentes ou non.

Les indicateurs ne sont forcément suffisants par eux même pour l'identification complète de dysfonctionnement s ou points à améliorer. Ils pointent les problèmes, font émerger les " points d'incendie " et parfois le caractère récurrent d'un problème. Ils sont l'alarme qui déclenche un travail de groupe pour identifier animer et mettre en route la méthode de traitement de problème.

Les limites des indicateurs se trouvent également du côté de la qualité des données.


Construction d'un indicateur


Il s'agit d'établir au moyen d'un indicateur une correspondance fiable et mesurable entre des phénomènes à caractère factuel et les phénomènes escomptés, à partir des informations disponibles.


Les premières questions à se poser sont :


- Existent-ils déjà ?
- Des indicateurs pourquoi faire par rapport à quoi ?
- Comment nous en servirons-nous ?
- Sont-ils utiles pour le suivi et l'amélioration de la qualité ?
- Les utiliserons-nous vraiment dans ce but : priorités, actions ?


Les types d’indicateurs nécessaires en général :


- indicateurs de processus ?
- indicateurs de résultats ?
- indicateurs des usagers ?


3. Le tableau de bord
 
Il faut passer d'une logique de planification a priori et de constat a posteriori à une logique dynamique et réactive : mesure/action/réaction. Bref, il faut piloter ! Avec l’entreprise “ réactive ”, le tableau de bord n’est plus un outil de contrôle mais un instrument d’aide au pilotage pour les acteurs/responsables.

Le tableau de bord n'est pas un instrument de motivation mais un instrument de progrès

Utiliser le tableau de bord et les indicateurs comme objets de motivation est un travers assez courant dans les entreprises. Trop souvent, on présente aux utilisateurs, des indicateurs de performance beaucoup trop généraux et fort éloignés de leurs préoccupations et de leurs moyens d'action. Les tableaux de bord ainsi construits sont purement et simplement inutiles. Si l'utilisateur ne dispose pas du levier de commande pour agir, l'indicateur ne sert à rien. A noter : les incontournables indicateurs mesurant la "satisfaction client" entrent généralement dans cette catégorie.

Il est aussi de tradition de définir les objectifs à atteindre comme autant d'obstacles à franchir, chacun récompensé par une carotte. L'indicateur servant alors de mesure officielle de la performance personnelle. Cette dérive particulièrement courante mérite toute notre attention. Elle se place tout à fait dans la continuité de l'utilisation archaïque du tableau de bord dont nous parlions ci-dessus. Il ne faut pas considérer un objectif comme la barre de saut d’un perchiste placée toujours plus haut par la direction. Il ne faut pas non plus considérer l'indicateur comme un compteur de points acquis. Ce n'est pas ainsi que seront résolus les problèmes de motivation. Un indicateur doit rester un outil d'aide à la décision. Il permet de s'assurer que les actions engagées s'incrivent bien dans la voie de progrès choisie. C'est ainsi que se définit la performance.


4. Principe unificateur : la roue de Deming

ITIL ne formalise pas cet aspect des choses, mais la méthode fait référence à Deming et à son approche PDCA : Plan, Do, Check, Act soit : programmer, faire, contrôler, ajuster (rectifier). Les principes du PDCA de Deming peuvent être déclinés de nombreuses manières, c'est une sorte de boite à outils très souple de la qualité et de l'organisation.



Le management de la qualité préconnisé par ISO 9001 version 2001 correspond bien au type de bonnes pratiques qui peuvent accompagner la mise place d'ITIL.


[fig.1 – Management de la qualité ISO9001 : 2000, in - André CHARDONNET - Dominique THIBAUDON Le guide du PDCA de Deming ]
Le système de management qualité ISO 9001 : 2000 permet de mettre de la simplicité dans la complexité de l’organisation. L’IQM [IQM94] le rappelait déjà en 1994 : “ Il y a en effet nécessité d’organiser le management du progrès dans l’entreprise car il ne suffit pas d’avoir de bonnes idées et une bonne politique, encore faut-il être capable de les mettre en œuvre effectivement.”



Le modèle structuré de l’ISO 9001 : 2000 répond à cette formule et rappelle le principe de cette organisation, comme le montre le schéma présenté plus haut :


- Partie droite : “ Les processus qui créent de la valeur pour le client et pour tous ceux qui ont un intérêt dans leur développement et à leur réussite. ”


- Partie gauche : “ Les systèmes de contrôle où chaque niveau inférieur justifie son existence à chaque niveau supérieur, qui, en contrepartie, lui donne son sens. ”


C’est le fonctionnement de cet ensemble qui constitue le management de l’entreprise

Réf biblio :
[AFNOR 03] Systems Engineering – System Life-Cycle Processes, Novembre 2003 AFNOR Z 67-288 (Ingénierie systèmes – Processus de cycle de vie des systèmes)
[IQM 94] Institut Qualité Management, “ Cahiers Qualité Management ”, no1 de juin 1994.
[Harrington 86] : James H.Harrington :  "The improvement process"
[Lemoigne 96] Jean-Louis Lemoigne “ La modélisation des systèmes complexes ”, 1996, Dunod.



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